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ACQUA ALTA A VENISE


Nous étions partis, Hélène et moi, ce mardi 12 Novembre en direction de Venise, pour visiter l’exposition la Biennale, dédiée cette année à l’Art Moderne, hébergée principalement dans l’ancien édifice l’Arsenale, siège des chantiers navals de la Venise du 13ème-17 ème siècles et dans le grand parc « Giardini » voulu par Napoléon à la fin du 18 ème siècle.

La météo n’annonçait rien de tellement bon, une semaine de pluie, mais c’est bien ce que l’on s’attends en Novembre, et nous n’avions pas de choix, la Biennale clôturant ses portes à Venise le 24 Novembre prochain.

En effet une fois descendus de l’avion à l’Aéroport Marco Polo de Venise, nous avons été accueillis par une atmosphère sombre, tout étant seulement midi, une petite pluie, un crachin on dirait à Bruxelles, la mer plutôt agitée et nous devions traverser un bras de mer pour nous rendre au centre ville de Venise. En route sur le bateau nous ne pouvions éviter de remarquer qu’il faisait quand même chaud et lourd pour la saison, à cause du vent de scirocco qui vient du sud.

A chaque arrêt du bateau des transports publics –on les appelle « vaporetto », petit vapeur, même si maintenant ils roulent au gasoil- nous voyons les voyageurs monter à bord chaussés de grosses bottes, ça nous semblait curieux. Arrivés enfin à notre hôtel sur la Riva degli Schiavoni, juste en face de la superbe petite ile de St. George, autre surprise : le mobilier du vaste hall de notre hôtel, tiens il y avait aussi un piano, avait les pieds plantés dans des pots vides, c’est pour les protéger de l’ »acqua alta », on nous a dit sans ajouter de plus, mais enfin ça nous apparaissait bizarre. Un bon repas léger vers les 14 heures, une belle promenade le long de la mer vers le parc Giardini, et nous voilà rendus à l’heure du souper, les repas sont sacrés en Italie, on ne peut pas les rater. Un petit sympathique resto pas loin de notre hôtel nous a accueillis, risotto ai frutti di mare, foie alla veneziana, pourquoi pas. Il y avait à coté de nous un sympathique groupe de touristes français qui semblaient avoir assez hâte de terminer leurs repas, mais pourquoi ? « a tavola non si invecchia (à table on ne vieillit pas »). En sortant du resto un de ces touristes remontait ses pantalons jusqu'au genou en franchissant la porte les pieds nus ! Mais que c’est ça, voyons !

Enfin vint notre tour de quitter le restaurant : horreur ! un petit flot d’eau commençait à pénétrer dans la salle à manger et à l’extérieur le trottoir était transformé en lac, paisible peut être, mais qui faisait un bon 30 cm de profondeur ! Et alors ? Rien à faire, pour nous aussi pantalons remontés jusqu’aux genoux, chaussures en main, et allez ! heureusement l’hôtel n’était pas loin : sur la porte un barrage métallique de 30-40 centimètres repoussait plus ou moins l’eau du lac. On est fatigués, on va se coucher. A 22 heures 25, l’électricité est tout d’un coup coupée dans notre chambre, pas de lumière, pas d’internet, seulement une petite lampe de service pour au moins voir où est notre lit.

Le lendemain matin notre hôtel est en grande agitation, l’électricité revient à 8 heures 20, mais l’ascenseur ne fonctionne pas ; le petit déjeuner est servi au premier étage, tant mieux. Là les gens de l’hôtel nous donne à chacun une paire de bottes ou plutôt de couvre-chaussures, hauts jusqu’aux genoux, c’est pour « l’acqua alta », on nous dit avec un air grave .

Nous descendons ensuite au rez de chaussée : on comprend enfin ! Le vaste hall si pas une piscine, était transformé en un étang d’ au moins 30 centimètres de profondeur !

On nous explique : pendant la nuit, poussée par un fort vent de 100 km/heure, l’eau de la mer a dépassé ou aussi déplacé à certains endroits les murs qui longent la promenade au bord de l’eau. Elle est pénétrée silencieuse et implacable partout dans la ville, envahissant maisons, hôtels, commerces églises (pauvre Basilique de San Marco !), musées, pour la deuxième fois seulement après la grande et grave inondation de 1966 ! Une hauteur de 187 cm on nous dit ! Quoi ? Si haut ? Pour rassurer un peu les gens il faut dire qu’il s’agit d’une hauteur mesurée à partir du fonds de la mer en situation normale, et qui équivaut à 40 cm par rapport au sol . Ce n’est pas donc un tsunami, il n’y a pas de danger de noyade, c’est plutôt un fleuve d’eau qui s’infiltre partout dans la ville. Une fois chaussés nos couvre-chaussures, nous sommes sortis à l’extérieur : l’eau nous arrivait aux mollets. Tout autour une air de désolation : des morceaux du muret qui nous séparait de la mer éparpillés ici et là, les passerelles placées sur les ponts avaient été soulevées par la marée et disloquées pas loin de là. L’arrêt du bateau-bus ARSENALE était fermé parce qu’un de ces bateaux s’était couché sur le quai, deux autres bateaux bus étaient allongés sur le trottoir, morceaux de branches d’arbres partout. Et surtout la ville, Vénice la Serenissima, n’avait plus de vie : tout était à l’arrêt. Où était il, on se demandait, ce système de contrôle des marées, lancé à grands titres, appelé MOSE, acronyme de Modulo Sperimentale Elettromeccanico, clin d’œil au personnage de Moïse (Mosé en italien) et à la scène biblique de sa fuite de l’Egypte et du miracle de la traversée de la Mer Rouge. Ce système qui aurait été bien utile en ces circonstances, est encore non utilisé pour des disputes techniques entre les différentes compétences administratives locales, et ceci au moins 25 ans du début des travaux. Puissance de la bureaucratie !

Les sites de la Biennale étant fermés, nous nous sommes dirigés vers le centre ville : l’eau était enfin rentrée dans les canaux, mais les traces de sa présence étaient partout je veux rentrer chez moi ! Je reviendrai te revoir ma chère Venise, mais à une autre saison, par exemple en Septembre. Je ne t’abandonnerai pas.

Giorgio Monaco Sorge

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